Journée mondiale des zones humides : découverte de la mangrove en Guinée, Guinée-Bissau et Sénégal

Article du 26 février 2021

A l’occasion de la journée mondiale des zones humides, le 2 février, le Collectif 5 Deltas (5∆) a réalisé différentes activités autour de la gestion durable de l’écosystème de la mangrove. Dans les trois pays du projet, la Guinée, la Guinée-Bissau et la région de la Casamance au sud du Sénégal, des membres du Collectif ont mené avec des communautés locales des actions de découverte et de sensibilisation à la protection de ces zones humides si précieuses. En Guinée Bissau, une sortie pédagogique dans le Parc National de Cacheu a été organisée par l’ONG GRDR pour faire découvrir la mangrove aux élèves et aux enseignants du lycée de la ville littorale. L’occasion pour les élèves d’en apprendre davantage sur les causes naturelles et anthropiques de la dégradation des mangroves et des modes de gestion et de préservation appliquées localement. Au Sénégal, l’ONG United Purpose (UP) a organisé pour les élèves d’une école primaire une visite du parc ornithologique de Kalissaye où vivent dans la mangrove des espèces menacées de tortues et d’oiseaux. Les enfants et leurs enseignants ont participé au nettoyage du site et découvert de façon ludique ce qu’offre l’environnement de la zone humide. En Guinée, l’ONG Eclosio a mobilisé les communautés riveraines des zones de mangroves urbaines à Conakry, autour d’un ciné-débat sur les enjeux liés à la préservation de l’écosystème et pour l’amélioration de leurs conditions de vie. En impliquant des acteurs directement concernés par la disparition des mangroves, la journée mondiale de célébration des zones humides a suscité un réel engouement dans les trois pays. Les acteurs présents ont réaffirmé leur engagement pour préserver les zones humides et les mangroves locales.

 

En Guinée Bissau, visite guidée de la mangrove et découverte de l’importance de l’écosystème sur la plan socioéconomique, écologique et culturel. Crédit : Collectif 5∆

 

Les pieds dans l’eau, les palétuviers poussent le long des littoraux aux embouchures de fleuves. L’écosystème de mangrove est donc à mi-chemin entre terre et mer. Particulièrement utile à la résilience des communautés face au changement climatique, cet écosystème unique fournit des services multiples aux populations du littoral : puit nourricier, la mangrove abrite une grande majorité des œufs de poissons tropicaux, elle est aussi une barrière naturelle contre les vagues, les tsunamis et les vents, elle limite l’érosion côtière et la salinisation des sols – notamment des terres agricoles le long des littoraux –, séquestre le carbone et filtre les eaux polluées par les routes et villes voisines. Exploitée pour son bois, ses poissons, ses huitres, son sel et pour la culture de riz, la mangrove est aussi essentielle à la subsistance des populations riveraines.

 

Pour Abdoulaye Soumah, un sage du quartier de Faban à Conakry, « la mangrove de Faban est un trésor pour nous, elle doit être protégé à tout prix ». Mais il ajoute : « J’ai horreur de voir l’état dans lequel se trouve cette forêt de mangrove que j’ai connu à mon adolescence. ». Dans la région, la mangrove aussi aujourd’hui un des écosystèmes les plus menacés par le changement climatique et l’action humaine. Plus de 35% des mangroves ont disparu ces 20 dernières années. Face à la montée des eaux, la hausse des températures générant de l’évaporation et les changements de précipitations, l’eau des estuaires dans laquelle pousse les palétuviers se salinise progressivement, impactant négativement l’écosystème des mangroves et la biodiversité qu’il abrite. Par ailleurs, parce que les mangroves sont très riches en ressources, elles sont particulièrement exploitées par l’humain. L’augmentation démographique et l’urbanisation sont aussi des facteurs du rétrécissement de la bande littorale, les constructions venant empiéter sur la mangrove. 

Les constructions illégales et l’exploitation du bois le long des berges dans le quartier de Faban à Conakry menace la survie de l’écosystème des mangroves. Crédit : Collectif 5∆

 

Financé par l’Union Européenne, le projet de Gestion des Forêts de Mangrove du Sénégal au Bénin (PGFM) vise à atteindre une protection intégrée des territoires de mangroves en Afrique de l’Ouest. Le Collectif 5∆ assure la mise en œuvre des activités du projets sur trois pays : le long des littoraux en Guinée Bissau, en République de Guinée et dans la région de la Casamance au sud du Sénégal. 

 

Dans ces trois régions, le collectif intervient pour protéger les écosystèmes de mangroves avec les communautés qui en dépendent, et pour leur permettre d’être davantage résiliants face au changement climatique. Le projet se décline en trois axes. D’abord, il vient appuyer la gestion des aires protégées, grâce à des activités de surveillance, de reboisement et de sensibilisation des populations locales dans les périmètres où la biodiversité est particulièrement riche. Par ailleurs, les membres du collectif travaillent sur la gouvernance de ces espaces menacés avec l’ensemble des parties prenantes des trois pays. A cheval sur plusieurs pays, le projet, permet la mise en place d’une coordination et d’une concertation transnationale entre gestionnaires d’aires protégées, communautés et gouvernements. Enfin, le projet vise à renforcer les capacités financières et de résilience face au changement climatique des communautés locales. En les accompagnant pour développer des activités génératrices de revenus, le Collectif 5∆ agit pour réduire la pression sur les mangroves et pour exploiter de façon plus durable les ressources qu’elles abritent. La préservation de la biodiversité de ces zones humides dépend particulièrement de la participation des communautés qui y trouvent leurs moyens de subsistance. Pour Cyrielle De Souza, la coordinatrice du projet chez Kinomé, il est essentiel de « rapprocher la protection des mangroves de la réalité des populations qui vivent sur place ». Des solutions pour une exploitation des mangroves à impact neutre existent déjà. Souvent, ce sont les populations elles-mêmes qui les formulent, explique-t-elle. Par exemple, en cultivant les huîtres en guirlande, les femmes ostréicultrices ne sont plus obligées de couper les branches des palétuviers pour les ramasser.

 

En Casamance, au Sénégal, les enfants d’une école primaire ont visité le parc ornithologique de Kalissaye où la mangrove abrite des espèces menacées de tortues. Crédit : Collectif 5∆

 

Créé en 2014, le Collectif 5∆ rassemble des associations locales, des organisations internationales et l’entreprise sociale Kinomé. Il est né avec l’objectif de mutualiser, à l’échelle régionale, les efforts et les savoirs pour la préservation et la valorisation durable de la mangrove en Afrique de l’Ouest. Il favorise le partage, diffuse des outils et bonnes pratiques de gestion des écosystèmes de mangroves. Ensemble, les membres du collectif portent des projets communs le long des fleuves Sénégal, du Saloum, de la Gambie, de la Casamance et du Rio Cacheu. Le collectif fait le lien entre les échelles locales, régionales et internationales. Interlocuteur unique des bailleurs de fond internationaux, comme l’Union Européenne dans le cadre de ce projet, il est aussi animé par les enjeux et dynamiques du terrain. Il vise également à appuyer et coordonner l’action des gouvernements pour une gouvernance durable des aires protégées à l’échelle de la région. 

 

Le projet Gestion des Forêts de Mangrove du Sénégal au Bénin est porté par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), en association avec Weltlands International et le Collectif 5 deltas. Il est financé par l’Union Européenne.

Le Collectif 5 Deltas intervient le long des littoraux en Guinée Bissau, en République de Guinée et dans la région de la Casamance au sud du Sénégal. Crédit : Kinomé