Article du 19 décembre 2022

Changement climatique, agrobiodiversité et sécurité alimentaire dans le monde

Article du 19 décembre 2022

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Ce dernier trimestre de 2022 a été riche en rencontres de haut niveau, sur le climat, la biodiversité, et la conservation. Yohann Fare, agronome et directeur de l’antenne Kinomé Madagascar revient sur le lien entre adaptation et agriculture.

Comment évaluez-vous l’état actuel de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans les pays en développement ?

Certes la situation est très contrastée d’un pays à l’autre et entre le rural et l’urbain, mais globalement la pandémie, l’inflation et plus généralement les aléas climatiques ont constitué ou constituent des enjeux pour la sécurité alimentaire et nutritionnelle dans les PED (Pays en Développement).

A Madagascar par exemple l’inflation actuelle vient exacerber une situation où plus de 50% des enfants de moins de 5 ans ont un retard de croissance et plus de 40% des enfants sont en insuffisance pondérale. Les villes ne sont pas épargnées du fait des pertes d’emplois durant les périodes de confinement et suite à des fermetures d’usines

Cependant, il faut souligner que malgré une situation économique difficile (perte de pouvoir d’achat des urbains, pression sur les prix, effet ciseau grandissant entre les prix agricoles et les prix de biens industriels, médicaments, fournitures scolaires), les exploitations agricoles familiales continuent à produire pour leur propre consommation et pour nourrir les villes en fruits et légumes variés (les ceintures maraichères continuent à produire autour des villes africaines), en céréales. 

Il convient de saluer leur courage et d’envisager des politiques volontaristes en leur faveur sur le plan infrastructurel (routes, ouvrages agricoles, …) et socio-technique (formation, protection sociale, accès aux services de santé,…). 

Quels sont les impacts du changement climatique sur la nutrition chez les populations des pays en voie de développement ?

Si le degré d’exposition des pays et zones agroécologiques aux effets du changement climatique sont connus, encore une fois l’impact est assez contrasté d’un pays à l’autre (selon par exemple la capacité des gouvernements et du tissu associatif à mettre en œuvre des mesures d’adaptation). Globalement le changement climatique vient perturber les saisons, rendant moins adaptées les semences traditionnelles à cycle long par exemple.

Au Sud du Congo, là où le paysan pouvait réaliser deux campagnes culturales par an, seul un cycle est possible tant que des variétés à cycle court et des mesures d’adaptation (irrigation d’appoint, gestion conservatoire de l’eau,…) ne sont pas mises en œuvre. 

A Madagascar, les Nations Unies ont déclaré en 2022 l’existence de la première famine liée au réchauffement climatique dans l’extrême sud aride où perdurait depuis plusieurs années une situation de faible accès aux mesures d’adaptation. Quatre années de sécheresse ont eu un impact direct sur des dizaines de milliers de ménages ruraux déjà fragiles. Pourtant des solutions existent. 

Quelles actions mettre en place pour lutter contre la malnutrition ?

Plusieurs actions sont à mener de front et de manière adaptée à chaque contexte. Les solutions ne seront pas les mêmes vis-à-vis des bidonvilles et du monde rural, ni entre les territoires ruraux dont les moyens de production ont été complètement anéantis et des zones confrontées à des situations plus conjoncturelles. En milieu urbain  il peut être question d’accès du plus grand nombre à une alimentation équilibrée et de qualité. Cela passe par un meilleur contrôle des produits maraichers par exemple.

La pandémie a suscité un regain d’intérêt de certaines classes moyennes vis-à-vis des fruits et légumes issus de l’agroécologie voire bio. C’est pour soutenir cet élan que Madagascar vient de publier une stratégie nationale sur le bio. Mais en ville, il existe aussi des ménages extrêmement pauvres qui malgré l’abondance des vivres sur les marchés n’y ont pas accès. Ici, il convient de les soutenir économiquement. Certaines ONG et offices nationaux rendent aussi disponibles des aliments enrichis pour les plus petits, couplés à de l’éducation nutritionnelle. A Tuléar à Madagascar comme à Kpalimé au Togo, des ONG se mobilisent pour servir des repas enrichis au moringa dans les cantines scolaires.  

En milieu rural d’une façon générale toute action pouvant permettre de sécuriser les campagnes agricoles est nécessaire : accès aux semences adaptées, ouvrages d’accès à l’eau agricole, formation et équipements sur les pratiques agroécologiques, etc. Pour les exploitations agricoles qui suite aux sécheresses sont en voie de décapitalisation (concrètement, cela peut se traduire par la perte de la seule paire de bœuf de trait qui permettait à la famille de labourer deux à trois fois plus de surface qu’en agriculture manuelle, vente de la charrue, de la charrette qui permettait aux femmes de transporter l’eau ou le fourrage,…), il convient de les aider à les reconstituer via des subventions ou des crédits adaptés.  

Enfin, il convient d’insister sur la nécessité de maintenir le fonctionnement des chaines de valeur locales et des marchés domestiques : tant que de la production existe localement, le soutien économique aux plus pauvres pour que ces derniers aient accès aux produits locaux peut être plus efficace que l’aide alimentaire importée. C’est ainsi par exemple que plusieurs programmes de cantine scolaires préfèrent financer les “mamans cantines” pour venir acheter des céréales, des légumes, fruits, du moringa, aux producteurs locaux. 

 

Quels programmes développer en faveur d’une agriculture durable ?

Par exemple, depuis plus de 10 ans que Kinomé participe à la structuration et au déploiement de la filière moringa dans une approche territoriale au Togo. Cet arbre, à l’instar de nombreuses autres plantes de l’agrobiodiversité locale, peut jouer un rôle essentiel dans la lutte contre l’insécurité alimentaire, le développement socio-économique et la gestion des problèmes environnementaux.

La plantation de Moringa en agroforesterie renforce le couvert ligneux des exploitations agricoles locales tout en diversifiant l’alimentation et les revenus des communautés locales. Ainsi, grâce à ses partenaires comme Oresys Plant&Protect et l’ONG CADO, Kinomé a distribué plus de 380 000 repas enrichis au Moringa (riches en protéines, fer, vitamines A et C) aux enfants de la région de Kpalimé (Togo) permettant d’améliorer leur statut nutritionnel.

DÉCOUVREZ TOUT SUR LE PROJET MORINGA INITIÉ PAR KINOMÉ ET SES PARTENAIRES DANS CETTE VIDÉO !

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